Les épaves ont une deuxième vie
On estime aujourd’hui à trois millions le nombre d’épaves englouties sur le globe. Se rendre sur une épave sous-marine est toujours un moment très particulier, un moment mystérieux. La carcasse dressée immobile à jamais devient alors un microcosme vivant qui se développe à profusion. Désormais, l’épave va servir d’habitat et de reproduction à toute une faune et toute une flore et créer ainsi un nouvel écosystème. Les algues et les animaux fixés s’y installent d’abord, attirant nombre de petits poissons qui eux-mêmes attirent les gros prédateurs. La faune et la flore qui investissent les lieux transforment ces épaves monochromes en un spectacle multicolore grouillant de vie.
Entrer dans le ventre d’une épave et y découvrir les restes de sa vie d’avant est toujours un grand moment d’émotion, car c’est d’abord un lieu tragique qui a souvent pris des vies. Mais dans le vacarme de la mort nait une autre vie. Jamais les êtres humains n’auraient imaginés que des navires ou des avions serviraient un jour de lieux de vie et de reproduction à toute une faune et flore sous-marine d’une telle richesse.
Rencontre avec un spécialiste des épaves
Après des décennies passées dans la mer, la ferraille sur certaines épaves n’est pratiquement plus visible par endroit tellement la vie abonde. Mais plus on descend et plus la faune est éparse et la flore absente. Comme dans tout habitat ces microcosmes ont des règles. Pour les comprendre, ÉLEAU a rencontré Laurent Urios, biologiste marin et passionné des épaves.
Il n’y a pas de faune particulière sur une épave. En fait, c’est le principe d’un récif artificiel. Quand on coule une épave volontairement ou non, elle apporte quelque chose de nouveau à l’écosystème déjà existant. Cette surface disponible en plus pour la faune et la flore va être colonisée selon plusieurs critères.
L’endroit où se trouve l’épave est déterminant
Tout d’abord, l’endroit où se trouve l’épave est déterminant. Si elle est dans une eau froide, profonde et avec un ensablement très fort, on aura moins de dégradation provoquée par les organismes vivants. En revanche, si elle se trouve en eau moins profonde avec du courant, de la lumière, comme par exemple sur nos côtes françaises, les organismes vivants vont se développer et dès lors condamner l’épave à une décomposition des matériaux plus ou moins lente mais inexorable.
Cette décomposition dépend des matériaux. Une épave en bois, en polymère ou en acier ne subit pas la même biodégradation. Ici, les épaves de guerres sont toutes en acier, leur décomposition est donc plus rapide que le plastique.
Vient ensuite l’environnement. Si l’épave se trouve dans une zone riche d’activités biologiques, soumise à des mouvements de mer, de houle ou à proximité de roches, la corrosion en sera accélérée.
Et puis bien évidemment, il y a le chalutage des bateaux pêcheurs qui va mécaniquement casser les structures, ou encore comme à Chuuk en Micronésie, la pêche à la dynamite qui par l’onde de choc tue tout sans distinction.
Quelques conseils pour visiter une épave
Très peu de plongeurs entrent dans les épaves, Il est conseillé d’y entrer avec un recycleur qui ne dégage aucune bulle. Mais attention votre vie est en jeu ! une épave peut-être fragilisée par endroits sans que cela ne soit vraiment visible. Alors, avant d’y pénétrer, assurez-vous auprès des plongeurs locaux que vous pouvez le faire. Faites-vous accompagner d’une structure expérimentée et connaissant parfaitement bien l’épave. Utilisez de préférence un recycleur qui ne fera pas de bulles ainsi que des lignes de vie et des blocs de secours. En cas de doute, n’entrez pas dans l’épave. Bon nombre de vies y sont restées, prenez soin de vous !
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