La Grande Nacre

Pour bien comprendre cet animal particulier et endémique à la Méditerranée, nous nous sommes rendus à la conférence du Professeur émérite Nardo VICENTE, responsable scientifique de l’Institut Océanographique Paul RICARD sur l’île des Embiez (Var) et grand spécialiste de la grande nacre. Nous vous avons rapporté quelques extraits sonores tout au long de cet articule consacré à ce bivalve.

Photo d'une grande nacre
Grande nacre (Pinna nobilis) peuplée de divers organismes

Description

Pinna Nobilis est un mollusque et pas n’importe lequel, c’est le plus grand coquillage de la Méditerranée et du monde avec le bénitier tropical, il peut atteindre plus de 1 mètre de hauteur. Sa couleur extérieure varie entre le gris brun et brun rougeâtre. Il vit sur des fonds sableux ou vaseux, dans les prairies de posidonies ou de zostères à une profondeur comprise entre 2 et 50 mètres. Ce bivalve ressemble à un éventail allongé, sa partie antérieure est pointue et enfoncée dans le substrat jusqu’à 1/3 voir la moitié de sa taille et sa partie postérieure, la partie visible, est arrondie. Ses valves sont couvertes de petites épines en forme de gouttières qui disparaissent chez les individus âgés. L’intérieur des valves est lisse, brillant, nacré, de couleur brunâtre. Les jeunes sont facilement reconnaissables car ils sont couverts d’écailles côtelées. D’ailleurs ils peuvent être confondus avec une autre espèce (Pinna Rudis), dont les écailles sont plus grandes et moins nombreuses et la taille n’atteint au maximum que 30 à 40 cm.

Professeur Nardo VICENTEExtrait de la Conférence sur la grande nacre – Institut Océanographique Paul RICARD de l’île des Embiez

Aussi étrange que cela paraisse la grande nacre n’est pas immobile. Et oui Pinna Nobilis a un pied qui lui permet de se déplacer, de se positionner sur un endroit favorable ou elle va pouvoir se fixer vers le courant à l’aide de son byssus, pour filtrer sa nourriture le plancton mais également des matières organiques. Précisons tout de même que la grande nacre se déplace quand elle est jeune ; quand elle atteint 30 cm, son poids ne lui permet plus ce déplacement.

Le déplacement de la grande nacre

Le byssus est composé de filaments soyeux qui ont servi dès l’antiquité et jusqu’au 20ème siècle à fabriquer des gants, des bonnets, des sacs à mains, ce tissu était très apprécié et sa nacre servait à fabriquer des boutons. La raréfaction de cette espèce à provoqué la disparition de l’industrie de cette fibre que l’on appelait aussi soie de mer.

Le byssus de la grande nacre

Son métabolisme est lent, c’est un mollusque paresseux comparé à d’autres mollusques puisqu’il ne filtre que 6,5 litres d’eau par 24 heures alors que les moules filtrent 100 litres d’eau par 24 heures ou encore les huîtres filtrent 40 litres d’eau par 24 heures.

Étude de la filtration de la grande nacre

La grande nacre ne vie pas seule

Ce mollusque est souvent accompagné de petits crabes (Pinnotheres pinnotheres et de Pinnotheres pisum) ainsi que d’un couple de crevettes (Pontania pinnophylax) qui vivent fidèlement dans les valves de l’animal durant toute sa vie. C’est un échange de bon procédé, ces espèces ont un abri ainsi que des particules alimentaires pour se nourrir, en échange elles assurent la protection de leur hôte et l’alertent de tout danger en pinçant une valve ce qui fait se refermer la coquille. Mais ce pas tout, l’animal accueille également une foule d’organismes qui viennent se fixer sur la coquille extérieure et qui peuvent même la recouvrir.

Organismes vivants sur la coquille de la grande nacre
Photo d'une grande nacre vivante au Embiez
Grande nacre vivante sur l’île des Embiez

Reproduction

C’ est un animal à hermaphrodisme successif à maturation asynchrone, la période de reproduction sur nos côtes s’étale de juin à août.

La grande nacre est hermaphrodite

L’Institut Océanographique Paul RICARD maîtrise aujourd’hui la reproduction de la nacre en milieu contrôlé, les scientifiques sont capables de « déclencher » une production de gamètes avec des techniques simples, notamment avec une élévation et un refroidissement de la température de l’eau. Le Professeur Nardo VICENTE a expliqué à ce sujet que malheureusement ils n’ont pas encore pu observer l’étape suivante du stade larvaire, c’est à dire sa transformation en coquille.

Production de gamètes de la grande nacre

Les juvéniles

Pour obtenir de jeunes individus, l’équipe de scientifiques procède au captage larvaire en milieu naturel puis à la ré-implantation des juvéniles. Le professeur nous explique sa méthode.

Captage larvaire de la grande nacre

Une table de vie a été établie ce qui a permis de voir qu’à un an, la nacre mesurait 12 cm et que sa croissance la plus forte était la deuxième année puisque sa taille doublait quasiment. Les années suivantes, la courbe s’infléchit et au bout de 20 ans la nacre mesure en moyen 80 à 84 cm de hauteur et sa durée de vie est estimée à une quarantaine d’années pour ce grand coquillage.

Les juvéniles en milieu naturel vont se rencontrer dans la matte morte de l’herbier car les rhizomes de l’herbier qui se constituent dans le sédiment forme un tapis épais qui est favorable à l’implantation des jeunes.

Mesure de la grande nacre

Ses prédateurs

Cet animal, il faut bien le dire, est victime de diverses prédations. La première étant l’homme, nous l’avons chassé pour fabriquer des articles (gants, sacs.. etc) pour le commerce mais aussi des souvenirs en tous genres. Nous avons également réduit son espace de vie avec l’aménagement excessif du littoral et sa bétonisation. La grande nacre a également deux prédateurs naturels, la pieuvre très intelligente avec la dextérité de ses bras et la dorade avec la puissance de sa mâchoire.

Les prédateurs de la grande nacre

La grande nacre est protégée

Ce bivalve a longtemps était chassé et le Professeur Nardo VICENTE s’est beaucoup battu pour sauvegarder cette espèce. Il a fallu attendre 1992 pour que cet animal soit protégé, d’abord au niveau national puis ensuite au niveau Européen par la convention de Barcelone.

Cet animal est en grand danger d’extinction

Depuis fin 2016, cette espèce est décimée par un parasite unicellulaire tueur, un protozoaire du genre Haplosporidium. Son expansion est très rapide et favorisée par le réchauffement de la température des eaux, il tue l’animal en 24 heures. Pinna Nobilis est en grand danger d’extinction. Plus de détail dans notre article « La Grande Nacre en grand danger d’extinction » avec l’interview du Professeur VICENTE.

Photo d'une grande nacre morte
Deux Grandes nacres mortes

Partager cet article :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut