Beaucoup de livres et de récits qui parlent de la mer mentionnent la raie manta. Cet animal appartient à la famille des Myliobatidae. Jusqu’en 2008 les spécialistes considéraient qu’il n’y avait qu’une seule espèce de raie manta mais une chercheuse, Andrea Marshall, a proposé de scinder l’espèce en deux. Désormais on peut distinguer la raie manta (Manta Alfredi) territoriale, ne s’éloignant pas des rivages et plus petite que sa cousine (Manta Birostris), pélagique, plus grande et plus difficile à observer même si elles fréquentent les mêmes lieux. Pour beaucoup, elles sont semblables à quelques différences près de coloration, de motifs sur le corps et de taille, alors pour ne pas se perdre dans ces deux espèces, nous parlerons dans ce texte de la raie manta.
On peut observer la raie manta dans toutes les mers chaudes ou tempérées du globe. Sa masse énorme varie de 5 mètres jusqu’à 8 mètres d’envergure pour les plus grandes, son allure offre un spectacle grandiose sous l’eau et le plongeur ne s’y trompe pas. Lentement, il aperçoit une silhouette au loin qui s’approche, il voit d’abord une tête très large avec deux nageoires céphaliques plus longues que larges qui font penser à des cornes à l’avant de ses yeux. Il la voit venir et s’enfoncer jusqu’à une profondeur de 40 mètres, puis elle remonte vers la surface, son corps peut peser jusqu’à 2 tonnes selon l’espèce. Majestueuse, elle glisse dans l’eau en faisant bouger ses nageoires simultanément de haut en bas, elle ne nage pas, elle vole.
Elle passe au dessous de lui, alors qu’il la voit de plus près il découvre son dos bleu noir avec sur chacune de ses épaules une tache blanche qui ne se rejoignent pas. D’ailleurs chaque individu possède une coloration unique qui lui permet d’être identifié. Elle passe, fait un cercle et revient, le plongeur en est certain maintenant, la raie lui offre son plus beau spectacle. Elle passe ensuite au dessus de lui, il retient sa respiration pour ne pas que ses bulles l’effraient, elle est tout prêt, il voit en détail sa face ventrale blanche qui possède cinq fentes branchiales bien visibles ainsi qu’une grosse tache des deux côtés, le bord postérieur des pectorales est pourvu de gris foncé.
Le plongeur se retourne pour la suivre du regard. Ce poisson vit rarement en groupe ou alors en très petit nombre. Elle s’approche lentement de la surface, l’effleure et ouvre en grand sa gueule pour capturer sa nourriture zooplanctonique avec l’aide de ses nageoires avant qui dirigent les petites crevettes, le krill et autres petits crustacés, en fuite devant l’immense bouche qui va les attraper. Cependant un mystère subsiste, alors que cette raie n’est pas carnivore c’est un filtreur, pourquoi a t-elle des centaines de petites dents dans sa bouche et à quoi lui servent-elles ? Même si la réponse n’a pas encore été trouvée par le monde scientifique, on peut quand même se demander s’il ne faudrait pas remonter dans le temps et plus exactement à la fin du dévonien il y a 300 millions d’années, avec la classe des Elasmobranchii de laquelle sont issues les raies et les requins. Les raies sont des requins aplatis dont le corps s’est modifié avec le temps pour s’adapter à la vie sur les fonds mais elles gardent le caractère essentiel de cette classe de poissons cartilagineux. Aurait-elle gardée cette particularité avec son évolution ? En tout cas, ni les raies ni les requins n’ont d’écailles mais ils sont couverts de minuscules dents épidermiques, ces denticules augmentent en nombre au fur et à mesure que l’animal grandit pour combler les vides.
Un poisson complètement inoffensif
Ce géant des mers est complètement pacifique sans aucune défense, il n’a pas de dard même s’il possède une épine caudale réduite, encastrée dans une masse calcifiée. Mais au vu de la taille de cette espèce, en a t’elle vraiment besoin ? Pourtant elle s’est faite une bien mauvaise réputation chez les pêcheurs qui disaient que ce diable de mer comme ils l’a surnommaient, pouvait entraîner les bateaux jusqu’au fond, on raconte même que cette raie venait recouvrir de son large « manteau » les pêcheurs de perles pour les noyer. Vous l’aurez compris, ces légendes tenaces appartiennent à la rêverie mais en aucun cas elles ne révèlent une quelconque vérité puisque la raie manta est un poisson totalement inoffensif qui préfère la fuite à la confrontation.
Le plongeur observe que l’animal a des invités sur son ventre, ce sont les rémoras (Echeneis naucrates) qui se fixent avec leurs ventouses sur ou sous la raie sans lui faire de mal mais ce fait pourraient bien être la cause des taches allongées gris violet sur son corps. D’ailleurs, quand la raie en a marre de servir de transport en commun aux rémoras, pour s’en débarrasser elle a sa solution, elle monte en surface rapidement et bondit hors de l’eau pour retomber brutalement avec un bruit ressemblant à un coup de tonnerre. Une fois les rémoras partis, la raie continue son chemin, il lui arrive aussi de s’arrêter à une station de nettoyage ou un labre va lui astiquer ses fentes branchiales et la débarrasser de ses parasites.
La reproduction
La raie manta est ovovivipare, Les organes copulateurs du mâle, les ptérygopodes sont situés à la base de la queue. Elle atteint sa maturité sexuelle quand sa taille atteint 3 à 4 mètres d’envergure. Quand la période de reproduction arrive de décembre à avril, elle est d’abord précédée par une course poursuite du mâle qui fait des acrobaties pour séduire sa belle, l’accouplement qui suit se fait abdomen contre abdomen durant quelques minutes. L’étreinte terminée, un siphon transporte le sperme dans l’oviducte de la femelle et l’oeuf ainsi fertilisé va se développer dans l’utérus. L’embryon enveloppé dans un sac absorbe le vitellus. Après l’éclosion de l’oeuf, le jeune reste encore dans l’oviducte et il reçoit une nutrition complémentaire de la mère. Le petit qui n’est pas encore né utilise la pompe buccale pour s’alimenter en oxygène. Il faudra que la femelle attende son développement complet avant de l’expulser, ainsi sa longue gestation dure entre 12 et 13 mois. Elle met bas en eau peu profonde, souvent dans des baies abritées, d’un petit ou peut-être deux qui a déjà l’allure d’un adulte. Il mesure à la naissance 1,2 m et pèse environ 45 kg et double de taille et de poids la première année. Cette animal ne féconde pas toutes les années, cela varie tous les 2 à 5 ans.
Une espèce en danger
La raie manta a une longévité estimée à 20 ans. Elle est classée comme espèce vulnérable par la liste rouge de l’UICN avec un risque élevé d’extinction depuis 2011. En cause, la surpêche sous toutes ces formes pour ses ailes, son fois et sa peau. C’est un poisson à croissance lente, à maturité sexuelle tardive et à faible fécondité. Il est indispensable de rappeler que la raie manta est au sommet de la chaîne alimentaire avec les requins, elle joue un rôle déterminant dans les écosystèmes marins avec les autres espèces qui leurs sont associées.
Magnifique animal merci beaucoup de les protéger ❤️